Absence injustifiée sans visite de reprise : Oubliez l'abandon de poste !

Comme il l’a été déjà écrit à nombreuses reprises dans ces colonnes, notamment en matière de harcèlement moral, l'employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses salariés. De par cette obligation, l’employeur se doit d’être particulièrement vigilant et « proactif » au terme des arrêts de travail de ses subordonnés.

Il ne peut ainsi laisser un salarié reprendre son poste après une période d'absence d'au moins 30 jours (pour cause d'accident -du travail ou non-, de maladie ou encore après un congé de maternité), sans le faire bénéficier, dans les 8 jours de la reprise du travail, d'un examen par le médecin du travail destiné à apprécier son aptitude à reprendre son ancien emploi.

Tant que cette visite n’a pas eu lieu, le contrat de travail reste officiellement suspendu, que le salarié ait repris –ou non- son travail (Cass. soc., 30 nov. 2010, n° 09-40.160).

Cette convocation à la médecine du travail ne pose généralement aucune difficulté dès lors que le salarié reprend son travail, manifeste sa volonté de le reprendre, ou mieux encore, sollicite lui-même l’organisation d’une visite de reprise.

Mais qu’en est-il lorsque le salarié ne se manifeste plus à l’issue de son arrêt-maladie (d’au moins 30 jours) ?

Dans cette hypothèse, aussi paradoxal que cela puisse paraître, la Cour de cassation considère que l’employeur qui n’organise pas de visite de reprise en raison de l’absence de manifestation par le salarié de sa volonté de bénéficier d’une visite de reprise, ne peut pas reprocher au salarié un abandon de poste, son contrat de travail étant toujours suspendu (Cass. soc., 23 sept. 2014, n°12-25503).

Par conséquent et en aucun cas, l’employeur ne peut donc profiter de cette situation pour considérer comme fautif  un salarié resté silencieux sur ses intentions à reprendre ses fonctions : sans visite de reprise, aucune sanction possible (et à fortiori de licenciement) à l’égard du salarié quel que soit son comportement.

Un employeur l’a récemment appris à ses dépens, comme en témoigne une affaire récemment tranchée par la Cour de cassation.

L’affaire concernait un directeur de magasin, qui, en arrêt maladie du 3 août 2009 au 30 juin 2010, ne reprenait pas son travail à la fin de son arrêt. Les deux mises en demeure successives de son employeur envoyées les 15 et 26 juillet 2010, lui demandant de justifier son absence ou de reprendre son poste, sont restées Infructueuses.

Las de cette situation, et en l’absence de certificat médical de prolongation, le 27 août 2010, son employeur a pris la décision de le licencier pour faute grave.

Le salarié a alors contesté le bien-fondé la rupture de son contrat de travail, et la Cour de cassation lui a donné raison !

Le licenciement ne pouvait pas, selon elle, être valable puisque le contrat de travail du salarié «demeurait suspendu à défaut d'organisation d'une visite de reprise, de sorte que le salarié n'était pas tenu à l'obligation de venir travailler ».

En conclusion, pour reprocher une faute au salarié, encore faut-il que l'employeur ait lui-même rempli toutes ses obligations…c’est d’une simplicité « biblique » diront certains, profondément injuste et amoral diront d’autres !

(Cass.soc. 6 mai 2015, n°13-22459)

Télécharger en version imprimable ici  (coupure Gazette du Midi - 08/06/2015)

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