Discriminations : dérapages d'employeurs "sous surveillance"

Certainement pour squeezer le plafonnement des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, issu des ordonnances Macron, les salariés, sur les conseils plus ou moins avisés de leur défenseur syndical ou avocat, multiplient aujourd’hui des actions prud’homales fondées sur des discriminations.

Dans son dernier rapport annuel d’activité, le Défenseur des Droits a relevé en 2017 une hausse de 4% de plaintes pour discrimination. Il faut dire que son efficacité redoutable n’y est sans doute pas étrangère. En fin limier, ses enquêtes approfondies sont souvent couronnées de succès (pour les victimes du moins).

Discrimination raciale

A titre d’exemple, le Défenseur des Droits a confirmé, après enquête, que le refus d’embauche d’une jeune africaine au sein d’une entreprise était bien discriminatoire.

Et pour cause : l’employeur, quelque peu désordonné ou étourdi, et à coup sûr nul en orthographe, avait laissé trainer une pochette de CV nommée "CV AFRIQIN" (regroupant tous les candidats écartés, d’origine africaine ou ultramarine) et l’inspection du travail (au cours d’un contrôle initié par le Défenseur des Droits) était tombée dessus !

Autre évolution notoire : Le Défenseur des Droits contribue désormais à la construction jurisprudentielle relative à la lutte contre les discriminations. C’est ainsi qu’il fut à l’origine de la reconnaissance du harcèlement sexuel « d'ambiance » consacrée par la cour d'appel d'Orléans (arrêt n° 15/02566 du 7 février 2017).

Harcèlement sexuel « d'ambiance »

Cette notion fait le buzz, en étant largement relayée par les médias. En l’espèce, la salariée concernée était la rédactrice d’un journal, (jugée) victime d’un harcèlement sexuel d’ambiance en raison de son environnement de travail particulièrement hostile : blagues salaces, propos insultants envers les femmes, photographies humiliantes affichées sur les murs de l’open-space, fonds d’écran pornographiques.

Discrimination en raison de l’orientation sexuelle

En marge de ces cas révélés après enquête, les juges se prononcent aussi sur des affaires bien plus simples où la discrimination est facilement détectable.

En témoigne l’arrêt rendu le 21 février par la Cour d’appel de Paris (Pôle 6 - Chambre 10 S 16/02237).

Dans cette affaire, un jeune coiffeur de 20 ans, en période d’essai, avait reçu, vraisemblablement par erreur, un SMS de sa responsable le concernant et ainsi rédigé : "Je ne garde pas X, je le préviens demain. (...) Je ne le sens pas ce mec, c'est un PD, ils font tous des coups de putes".

Le lendemain, son contrat de travail était effectivement rompu. Pour la Cour d'appel de Paris, le contenu (particulièrement explicite) de ce SMS faisait apparaître "que le véritable motif de la rupture de la période d'essai n'était pas en lien avec les aptitudes professionnelles" du coiffeur.

Le coût de cette erreur de manipulation du téléphone portable (peut-être infecté par un virus « homophobe »?) a dû défriser le responsable du salon.

Les Juges de la capitale ont en effet considéré qu’en présence d'une telle discrimination "en lien avec l'orientation ou l'identité sexuelle supposée" de la victime, la rupture du contrat de travail était nécessairement nulle. Ils ont ainsi alloué au jeune coiffeur (en période d’essai…), 23 000 euros (dont 8 000 euros à titre d'indemnisation du préjudice moral et du caractère odieux et vexatoire de la procédure de rupture).

Notons que la Cour d’appel a censuré le jugement du Conseil de prud’hommes de Paris qui, avait fait grand bruit en son temps : étonnement, le salarié avait été débouté de ses demandes, et (encore plus inouï) l’employeur, lui, dédouané de sa remarque homophobe, les conseillers prud’homaux considérant celle-ci en rien discriminatoire  au regard du milieu professionnel en cause !

Employeurs, que vous soyez –ou non- à la tête d’entreprise « libérée » (à l’instar de Décathlon, Michelin…) très en vogue actuellement, ne « libérez » pas trop votre parole pour autant.

 Télécharger en version imprimable ici (coupure Gazette du Midi - (03/05/2018) 

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